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Transcription - "C'est pas une liaison interdite ?!" Episode 14 Moi-même en français

Ecoute l'épisode ici : Episode 14.


Vicente : Hola Alice, qué tal?

J'ai besoin de poser une question sur la prononciation à Allo Aliaé. Tu connais Jamie de "C'est pas sorcier", en ce moment, il y a plusieurs émissions, une d'entre elles qui s'appelle "C'est l'idée" où il présente des actions innovatrices des professionnels pour aider la planète.

Heu, dans une des émissions, sur des matelas recyclés, (je te passe le lien), à la fin de la vidéo y'a une des personnes qui dit "je vais m'allonger un peu" donc il fait une liaison enter "allonger" en infinitif et "un peu" qui suit derrière. Et ça m'a fait très bizarre parce que je pensais qu'on devait pas faire la liaison d'un infinitif qui finit par "r" suivi d'une voyelle. Est-ce que tu peux me dire ou m'expliquer si on doit ou pas le faire et à quel moment on est obligé de le faire" ?


Alice : Bonjour Vicente, bonjour à toutes et tous ! Celles et ceux qui nous connaissent se doutent probablement que Vicente a déjà eu une réponse à cette question mais j'ai décidé d'en faire un épisode de podcast parce que la question des liaisons est souvent problématique pour les non-francophones même à un niveau avancé, et elle est assez révélatrice de la culture française à différents niveaux.

Alors une liaison c'est bien quand on fait sonner une consonne finale qu'on n'entend pas normalement dans le mot, on la prononce parce qu’on va connecter le premier mot au mot qui suit qui commence par une voyelle. Je prends l'exemple du mot "les" (l'article défini les), si je dis "les cours" on n'entend pas le "s" de la marque du pluriel mais si je dis "ours" qui commence par un "o", on va entendre "les [z]ours" ou la même chose avec un mot qui commencerait par un "h" muet comme dans "les heures" (du mot « heure », une heure).

C'est la liaison la plus fréquente, la liaison en "z" qui marque le pluriel, y' a d'autres liaisons avec la consonne "t" par exemple "quand on veut" ou avec la consonne "n" "mon ami·e". La liaison avec la consonne "r" est vraiment rare, c'est pour ça à mon avis que c’est quelque chose qui t'a surpris. Elle est vraiment peu fréquente donc on peut éventuellement l'entendre avec les verbes à l'infinitif qui se terminent par "-er" ou d'autres mots qui se terminent par -"er" ; on n'entend pas la consonne "r" parce que la combinaison des lettres se prononce "é" / [e] mais de temps en temps on va l'entendre parce que le mot qui suit commence par une voyelle.

Je dis bien de temps en temps parce que ce n'est pas toujours le cas. Il faut savoir qu'en français, il y a différentes sortes de liaisons.

On va avoir des liaisons obligatoires comme celles dont j'ai donné l'exemple avec « les ours".

Un exemple de liaison obligatoire en "-r" premier étage. Dans le mot « premier », si je le dis seul on n'entend pas le "r" par contre si c'est suivi de la voyelle et du son "é"/[e] on entend bien premier [r]étage". Ça ce sont des liaisons obligatoires, on est obligé de les faire.

A l'inverse, il y a des liaisons qu'il ne faut pas faire, elles sont interdites, l'exemple du mot "et" est assez éclairant. Si je veux parler de 2 personnes, "Claire et Alice" j'entendrai pas le "t" jamais, le "t" final du mot "et" même si le mot qui suit commence par une voyelle. Pour le cas de la consonne "r", par exemple, si le mot est un nom suivi d'un verbe on n'entendra pas non plus la consonne "r". Le chantier se termine par "r" – « Le chantier est terminé ». Il est impossible, c'est interdit de dire "le chantier [r]est terminé". Parce que c'est un nom suivi d'un verbe.

En plus de ces 2 catégories, on a une troisième catégorie de liaisons facultatives !

Exemple : c'est [t]important »/ [setɛ̃portã], je peux dire « c'est important »/ [seɛ̃portã]. Ce qui change.. parce qu'on pourrait se dire "oh bah c'est très pratique, pour les facultatives, je le dis quand je veux et puis quand j'oublie, quand je sais pas trop comment se termine le mot eh bah je fais pas la liaison !" Alors attention, parce qu'en fait le fait de faire la liaison est révélatrice, marque le niveau de langue. Est-ce qu'on est en train de parler un français courant voire familier, ou est-ce qu'on parle un français soutenu parce qu'on est dans un contexte formel par exemple ? Plus on veut s'exprimer de manière soutenue et formelle, plus il faut, c'est recommandé, de faire la liaison même si elle est facultative. En tous cas c'est ce qu'on remarque. Les personnes qui font les liaisons facultatives s'expriment dans un français soutenu, dans un registre formel. C’est le cas souvent des personnes politiques interviewées ou dans des émissions de radio on va entendre des liaisons facultatives. A l'inverse, moins on fait la liaison facultative, plus on s'exprime dans un registre courant, un français un petit peu familier. Donc le fait de faire la liaison ou pas, ça montre une certaine maîtrise du français, au moins une maîtrise de la façon dont on a envie de parler, de sa capacité à s'adapter aux personnes avec qui on parle, au milieu, au contexte dans lequel on est. Et c'est ça qui peut être difficile pour des non-francophones, donc si vous voulez montrer votre maîtrise du français dans un contexte formel, essayez de faire les liaisons facultatives. Mais attention à ne pas faire celles qui sont interdites, c'est vraiment tout le challenge, le défi ici !

Je pense que ce qui fait "bizarre" dans l'émission de Jamie quand le journaliste dit "'j'vais m'allonger [r]un peu", ce qui est étonnant c'est qu'au-delà du fait que c'est une liaison qu'on n'entend pas fréquemment, il y a un décalage dans le ton du journaliste. Il emploie un ton décontracté, familier, en plus il dit "j'vais" au lieu de "je vais" et donc il a plutôt ce style décontracté mais il va faire cette liaison facultative "m’allonger [r]un peu" qui elle est clairement du registre formel. Et c'est là que ça accroche un peu et qui peut nous faire un peu bizarre. Alors ce qui est bien, c'est que ça permet aussi de déculpabiliser en tous cas, de pas trop se prendre la tête puisqu'on voit bien que même des francophones natifs come ce journaliste peuvent se mélanger les pinceaux dans le registre, cette question de registre et de ton, et ne pas forcément bien adapter leur façon de parler avec le contexte dans lequel ils sont.

Merci beaucoup pour cette question.



J’en profite pour faire une petite annonce qui t’intéressera, ami·e non-francophone si comme Vicente tu as des questions existentielles sur la prononciation du français… en septembre, j’ouvre un nouveau programme « français Version Orale ». C’est un programme cours de 4 séances pendant lesquelles on travaille en tout petit groupe de 4 personnes maximum sur la prononciation et la mélodie du français, à travers 4 activités phonétiques et 4 chapitres d’un classique de la littérature francophone. Dans la prochaine édition on travaillera à partir du Petit Prince d’Antoine de St-Exupéry, qui est une pépite pour apprendre à transmettre des émotions pour faire passer un message… Pour en savoir plus, tu peux aller sur mon site internet aliae.fr, sur la page « français Version Orale ». Et comme c’est la première édition, je fais même une offre pour son lancement, puisque oui c’est un programme payant comme mes autres programmes de cours, qui me permettent entre autres de proposer des ressources gratuites comme ce podcast « Moi-même en français ». Je fais une pause estivale, au mois d’août donc on se retrouve en septembre pour un épisode « Trucs et Astuces » avec Stéphane Wattier de « Commun français » qui nous explique comment bien travailler sa compréhension orale. En attendant, je te souhaite un très bel été, à la prochaine !

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